7.5/10Les Annales du Disque-Monde - Tome 19 - Pieds d'argile

/ Critique - écrit par nazonfly, le 29/01/2010
Notre verdict : 7.5/10 - A pas rances (Fiche technique)

Des golems intelligents, des filles à poil, des filles à barbe, des rois faignants et saoûls, un vieillard assassiné à coups de pain. Que demander de plus ?

Dix-neuvième volume des Annales du Disque-Monde, Pieds d'argile est avant tout une histoire de généalogie. Pas forcément celle qui fait qu'on retrouve un arrière grand-père éleveur de chèvres dans les Montagnes du Bélier, mais plutôt de celle qui fait et défait les rois. Les rois. Il y aurait sans doute beaucoup à dire sur les rois, notamment qu'ils sont pour la plupart fous, cruels ou complètement idiots, voire parfois les trois en même temps. Mais le peuple a ses raisons que la raison ne connaît point : il faut bien dire qu'il est vraiment plus classieux d'avoir affaire à un roi qu'à un homme du commun, même s'il s'appelle Vétérini. Et c'est là que la généalogie intervient. Car le dernier roi connu d'Ankh-Morpork s'est malheureusement fait raccourcir par Face-De-Marbre Vimaire, ancêtre du Commissaire le plus célèbre du Guet (Au guet !, Le guet des orfèvres). Cependant les rumeurs courent sur un membre du Guet qui serait justement l'héritier légal du roi. Le caporal Carotte, nain d'adoption de deux mètres de haut, serait-il ce fameux héritier ? Après tout, il génère une sympathie immédiate, il a une tache de naissance en forme de couronne et, par dessus tout, il a une vieille épée. Le caporal Chicque, l'être humain le moins humain possible, n'a pas d'épée, mais une bague. Et s'il était un descendant du Comte D'Ankh, un descendant dégoûtant certes mais un descendant royal, ce qui en ferait un gendre intéressant pour maintes belles mères.

1001 pièces

Pendant que le peuple se pose des questions sur ce fameux roi qui les exploiterait d'une façon agréable, le Guet ne chôme pas. Etrange coïncidence, le Praticien Vétérini semble se mourir, empoisonné par une substance inconnue et prêt à céder sa place à la tête d'Ankh-Morpork même s'il représentait pour tout le monde, ou presque, une certaine stabilité dans la ville. Les Voleurs ne volent plus qu'en accord avec la Guilde, les Assassins n'assassinent plus qu'en accord avec la Guilde. Tout semblerait presque parfait dans cet idyllique tableau si les crimes étranges ne se multipliaient. Il y a d'abord cet expert du pain de nain occis avec l'une des plus fameuses armes boulangères. Puis le Père Tubelcek, un vieil homme tout ce qu'il y a de plus innocent. Et puis il y a ces golems qui se multiplient comme des petits pains mal cuits et inquiétants. Autant de pièces d'un puzzle dispersé dans les rues pavés d'Ankh-Morpork. Un puzzle que le Guet va s'efforcer de reconstituer grâce notamment aux talents alchimiques de leur nouvelle recrue, le Nain Hilare Petitcul (on est au siècle de la Roussette, que diable !).

Marx la menace

Les apparences sont souvent trompeuses chez Pratchett mais c'est particulièrement vrai dans Pieds d'argile dans lequel les choses se révèlent toujours sous un jour différent. Les rois représentent l'espoir, mais les poivrots sont des rois. Les Nains sont des femmes, mais les femmes sont des loups. Heureusement l'homme reste un loup pour l'homme ou, du moins, pour ces êtres de classe inférieur, ces automates vivant que l'on nomme golems. Comment ne pas voir dans Pieds d'argile une réécriture de Marx et du prolétariat prenant le pouvoir ? Une nouvelle fois, Pratchett parvient à transposer notre propre monde sur une planète plate comme une assiette (mais sans la fourchette à côté). Certes, comme dans les derniers tomes des Annales du Disque-Monde, notamment dans la série du Guet, l'humour cède un peu de place à la réflexion délaissant la parodie des mondes fantastiques pour une parodie de notre propre société.