6.5/10La Voie des ombres - Tome 1 - L'ange de la nuit

/ Critique - écrit par Guillaume, le 02/03/2009
Notre verdict : 6.5/10 - Le prix du Brent à la hausse (Fiche technique)

Brent Weeks fait son best seller en version originale. Traduit chez Bragelonne, la trilogie de la voie des ombres mérite le détour, tout en nous laissant un peu sur la réserve.

Derrière une couverture brillamment réalisée par Frédéric Perrin, se cache le premier tome de la trilogie La voie des ombres de Brent Weeks. Best seller en version originale, le récit du bougre est présenté comme un mélange entre Robin Hobb (l'assassin royal) et David Gemmell (le lion de Macédoine).

Dans une ville aux quartiers découpés par activités et classes sociales (les pauvres à la rue, les riches dans les beaux quartiers surveillés et sécurisés), de multiples groupes s'affrontent pour obtenir le contrôle de la cité. Les petites guildes de gamins chapardeurs ou mendiants cotoient le groupe des Neuf -réelle direction de la cité-, les nobles et le roi. Dans cette boîte de Petri, terreau de toutes les intrigues, Azoth, gamin voleur des rues, croise l'ombre de Durzo Blint, pisse-culotte invincible.
Ce dernier ne tâche pas ses chausses, au contraire, cette dénomination le désigne comme un impitoyable assassin pour qui tuer est un art. Peut-être est-ce une façon élégante de décrire la réaction de ses victimes ?

Azoth souhaite devenir l'apprenti du maître des ombres. Vie pitoyable, racket incessant, insécurité perpétuelle, impuissance à empêcher son meilleur ami de se faire violer nuit après nuit par le chef de guilde... Tous les éléments sont assemblés : pour se sortir de cette situation, y a-t-il meilleure opportunité que celle de devenir un pisse-culotte, c'est à dire un homme prêt à tout affronter, insensible à la peur, prompt à se défendre ?

Brent Weeks ne fait pas dans la dentelle, l'univers est cru, évoquant putes, viols, souffrances et mort, tout en gardant assez de retenue pour que le récit reste divertissant. Le monde d'Azoth est dangereux et impitoyable, mais le héros s'en sort toujours, ayant une nature résolument optimiste malgré ce qu'il aimerait laisser penser.
Faisant écho à cette sombre vision, le langage du livre n'est pas des plus châtiés, parfois assez vulgaire, apportant une véracité renforcée à l'ensemble, et permettant à l'action de se dérouler sans subir aucun retard.

C'est bel et bien ce qui fait la moelle de l'Ange de la nuit : l'action. Brent Weeks ne joue pas à mimer Tolkien, il évite tout ce qui peut donner lieu à plus de trois lignes de descriptions. Conséquence immédiate : on ne s'ennuit jamais, on est parachuté au coeur de l'intrigue, parfois même on ne comprend pas pleinement de quoi il est question, jusqu'à ce qu'un dialogue ou un geste délivre son savoir.
C'est assez efficace, tout en empêchant de conceptualiser le récit. On subit ce qui se passe, on peut difficilement souffler voire même prédire la suite de l'aventure. On regarde, on assiste, on reste sans voix, surpris pas des retournements de situations pas forcément très ingénieux... et parfois, au contraire, forts bien menés.

Si tout semble noir et blanc au début, le récit se métamorphose progressivement, en même temps que les personnages grandissent et se découvrent, pour aboutir à une trame grise mais pas terne, qui ajoute une profondeur certaine à une histoire que l'on pourrait au premier abord qualifier de standard de Fantasy. Le coup de l'assassin et de l'apprenti, on nous l'a déjà fait. Celui du mauvais homme qui se repent aussi. Ici, c'est un peu des deux, sans pour autant chercher l'imitation.

Brent Weeks, s'il n'est pas un grand tisseur d'univers et s'il n'est pas le meilleur à créer de l'empathie autour de ses héros, sait s'écarter des sentiers battus en partant de postulats déjà rencontrés ailleurs, associer avec brio toutes ses ficelles, et ainsi proposer une oeuvre cohérente et prenante, finalement assez éloignée des stéréotypes du genre.