7.5/10Sur la route, le livre

/ Critique - écrit par nazonfly, le 22/05/2012
Notre verdict : 7.5/10 - Filles, alcool et jazz (Fiche technique)

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Avec Sur la route, Jack Kerouac a certainement écrit son chef d’œuvre, un livre acclamé par tout le monde, un livre symbole du mouvement artistique nommé beat generation par Kerouac lui-même. Pourtant, même s'il est indéniablement une ode exaltée à la liberté, on ne peut qu'être déçu par la quasi-absence de cette fameuse route ainsi que par certains aspects qui paraissent un peu étranges, voire dérangeants plus de 50 ans après la sortie du livre.

En route avec Paradise

Sur la route est l'histoire de Saul Paradise, un jeune homme épris de liberté qui voyage incessamment d'un bout à l'autre des États-Unis, souvent pour suivre le fameux Dean Moriarty, lui-même plus ou moins à la recherche de son père. Sans aucune attache, Paradise, Moriarty et les autres membres de la bande vivent au jour le jour, bossant de temps à autre, tapant une tante par ci, des parents par là pour subvenir à leurs besoins. Une vie de bohème sur un fond de musique jazz endiablée, de soirées débridées où l'alcool et la drogue sont des invités obligés, et de virées en bagnoles dès que l'envie de bouger se fait sentir.

Inépuisable vitalité

Le plus fascinant est que cette vie de bohème n'est pas une invention d'un auteur en mal de liberté. Il s'agit d'un roman autobiographique, écrit d'un seul jet, sur trois semaines, sur un long rouleau de papier de 36 mètres de long. Cette écriture spontanée semble née d'un sentiment d'urgence qui se ressent dans chaque ligne de cette ode. Et qui d'autre que Dean Moriarty, avatar de Neal Cassady, pourrait symboliser le mieux cette exaltation de la vie ? Il rayonne dans tout le roman d'une vitalité inépuisable ; il est le soleil autour duquel gravitent les satellités que sont Carlox Marx (alias Ginsberg), Old Bull Lee (Burroughs) et Saul Paradise (Kerouac himself) : le rôle de ce dernier est d'ailleurs limité, pendant la majeure partie du livre, à celui d'observateur de Moriarty, voire tout simplement de bête suiveur.

Solitaires

De la même façon, il nous paraît important de préciser la position des femmes dans le roman de Kerouac : au mieux, elles sont invisibles et restent en arrière-plan, au pire elles sont des empêcheuses de tourner en rond (de s'évader) qui coupent le lien entre ces vagabonds solitaires. Moriarty, par exemple, n'hésite pas à plaquer femme et enfants pour se barrer de l'autre côté du continent et y fonder une nouvelle famille, tout aussi accessoire. On est d'ailleurs curieux de savoir comment seront gérés les personnages féminins dans la prochaine adaptation du roman, d'autant plus que Kristen Stewart et Kirsten Dunst seront de la partie !

Not on the road again

En dehors du rôle des femmes, un autre aspect du roman mérite d'être noté : l'absence de cette fameuse route. Malgré son titre, Sur la route n'est, en effet, pas ce road book qu'on pourrait imaginer. La route n'est qu'un moyen de rallier l'est des États-Unis où crèche la plupart du temps Saul Paradise et l'ouest territoire de Moriarty : hormis lors de deux intenses passages, l'action se déroule dans des lieux classiques, à New-York, Denver ou San Francisco. Il est ainsi étrange qu'on entende souvent qualifier Sur la route d'instigateur du road movie !

 

Malgré ces quelques défauts, il n'en reste pas moins que Sur la route est un roman majeur, un hymne à la liberté, à l'insouciance dans un monde qui ne s'encombrait pas de frayeurs sur l'avenir. En ce sens, on jalouserait presque ce passé enchanté où tout pouvait sourire à tout le monde, loin, très loin du désenchantement acerbe de la génération X.