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5.5/10Les agonies de l'innocence - Violetta Liddell

/ Critique - écrit par C.Saffy, le 08/09/2013
Notre verdict : 5.5/10 - Que l'enfance est longue à mourir ! (Fiche technique)

Tags : editeur tabou roman nouvelles lecture litterature arts

Voici une petite nouveauté dans le catalogue roman de Tabou : un livre qui, s’il est certes question de sexualité ou de tension sexuelle, ne peut être qualifié à proprement parler de littérature érotique. Recueil de quatre nouvelles écrites par la toute jeune Violetta Liddell – un nom d’auteur hautement gothic-lolita – Les agonies de l’innocence explore une fantasmatique morbide, horrifique même parfois où l’érotisme se mêle au sang et au fantastique.

On y retrouve toutes les thématiques qui composent un imaginaire gothique juvénile : nymphettes en corset et jupes de velours noir, goût éperdu pour les chanteurs androgynes à cheveux longs et vêtus de cuir, une envie de jouer à se faire peur et le folklore vampirique et danse avec les morts à l’avenant, métaphores liées aux fruits, aux bonbons, aux sucreries – et même mention de la marque Haribo au détour de quelques pages. Des quatre nouvelles qui composent Les agonies de l’innocence, la première – « Trois petits chats » - est sans conteste la meilleure. Poisseuse, à l’ambiance lourde et perverse, elle est de surcroît celle dont l’écriture est la plus tranchante, la plus travaillée. On est happé par cette histoire de maman rock’n’roll et de sa fille, une étrange adulte en miniature aux canines mystérieusement disparues, un duo au contact duquel le narrateur perd tous ses repères. Musicien pour un groupe dont les membres ont tous disparu les uns après les autres dans des circonstances atroces, Stephen se retrouve entre leurs filets… avant de manquer y passer à son tour, après une découverte qui le fascine, l’écœure et l'excite.

Meilleure nouvelle du recueil donc, c’est également celle dont le final même si en demi-teinte, est le mieux écrit. Car c’est le principal défaut de Violetta Liddell : elle a énormément de mal avec les chutes, alors que c’est justement la chose à ne pas rater dans une nouvelle… De plus les trois autres textes du recueil se révèlent en comparaison beaucoup plus faibles, moins abouties avec quelque chose de très adolescent, dans sa version mal dégrossie. On a parfois l’impression d’être plongé dans l’univers des premiers romans de Poppy Z. Brite ou Sire Cédric – ce qui n’est pas nécessairement un compliment tant les débuts de ces deux auteurs ont compté leur lot de clichés dark outranciers (vampires homosexuels au cœur de glace, sexe impur mais convenu, sociétés secrètes perverses et encapuchonnées, jeunes filles friandes de musique indus/metal prête à mourir pour un simple moment entre les bras de romantiques à la petite semaine…).

Cet aspect est le plus manifeste dans « Révérend Morbidesse » qui conclut le recueil et forme une boucle puisqu’on y retrouve des personnages entrevus dans « Trois petits chats » – un spin-off en quelque sorte. On y suit la très jeune Cherise (ceci n’est pas une faute de frappe, c’est son vrai prénom) qui abandonne ses disques de Cute Cat Girls pour s’abandonner aux délices de ceux de Nocturnal Nevrosia et de son chanteur pour lequel toutes les fans se pâment : Laurel Hadrian Thomas. Quitte à faire le mur de la maison de ses grands-parents chez qui elle vit, quitte à voler dans leur porte-monnaie pour y trouver de quoi se payer ce qui manque pour son billet de concert ou de train pour aller les voir. Cherise est la narratrice du texte, et on a l’impression de lire un blog de groupie avec tous les tics du genre : amour inconditionnel pour l’idole – un révérend comme Marilyn Manson -, fantasmes plus érotomanes qu'érotiques et beaucoup d'immaturité, même quand on enfile ses vêtements de cuir. Il faut l'incursion d'une scène de sexe particulièrement macabre pour se rappeler où nous sommes et qui saisit enfin dans tout ce fatras dégoulinant de glucose et de moues énamourées. Le suicide par amour n'est jamais très loin, et malheureusement Violetta Liddell ne nous l'épargnera pas...

On retiendra surtout l'écriture de Violetta Liddell, souvent maîtrisée, riche et recherchée. On ne peut nier que les rares incursions érotiques de ce recueil sont surprenantes et excitantes, on ne peut que regretter qu'elles soient noyées dans des structures narratives qui auraient mérité plus de réflexion et de travail – notamment les dialogues, pour la plupart horripilants à souhait. A découvrir, un texte de l'auteur pour un concours de nouvelles érotiques chez Edilivre qui préfigure, le meilleur – et le pire – de l'auteur.