5.5/10Zorro

/ Critique - écrit par riffhifi, le 26/08/2009
Notre verdict : 5.5/10 - XIXth Century Fox (Fiche technique)

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Naissance, enfance et adolescence du dénommé Diego de la Vega. Et la suite ? Mais la suite vous la connaissez déjà, amigos ! Alors ici on ne vous raconte que la période inintéressante !

Cette année, le personnage de Zorro a 90 ans. Apparu pour la première fois dans The Curse of Capistrano de Johnston McCulley, il a bondi de la page à l'écran dès 1920 grâce à Douglas Fairbanks, et n'a jamais vraiment quitté l'inconscient collectif puisqu'on le retrouve régulièrement dans la littérature, au cinéma, en bande dessinée, et même sur scène (l'adaptation made in Broadway atteindra les planches françaises en novembre). En 2005, tandis que Martin Campbell tournait La légende de Zorro avec Antonio Banderas et Catherine Zeta-Jones, l'écrivain Isabel Allende était contactée par Zorro Productions pour écrire un roman qui reflète sa propre conception du personnage. Entre un acteur espagnol et une romancière chilienne, le vengeur masqué renouait incontestablement avec sa nature latine. Mais là où le film imaginait les aventures hypothétiques d'un successeur de Don Diego, le roman sobrement (trompeusement ?) intitulé Zorro revenait sur la jeunesse du gaillard, des origines de sa naissance jusqu'à l'éclosion de son alter ego justicier.

Raconter les origines pour éviter d'avoir l'impression de ressasser une histoire mille fois traitée, ce n'est pas un concept totalement nouveau. On l'a déjà vu... un peu partout à Hollywood ces dernières années ! En 2005, justement, Batman subissait ce traitement dans le film de Christopher Nolan Batman Begins. Faut-il pour autant y voir autre chose qu'une fausse bonne idée, prétexte à tartiner un nombre réglementaire de pages ? Isabel Allende connaît manifestement le personnage, et le respecte suffisamment pour avoir potassé son sujet sérieusement : le contexte historique est décrit avec soin (et laisse percer quelques guest-stars "réelles"), les éléments du récit sont étudiés pour s'intégrer au maximum dans la mythologie
connue du grand public (la série Disney, le film de 1998), et les différentes étapes de l'intrigue sont pensées comme autant de jalons sur la route de celui qui deviendra Zorro. Mais le problème réside justement dans ce choix de repousser perpétuellement à plus tard la naissance du héros : il ne s'agit pas d'un Zorro begins, mais d'un Zorro will begin, une pré-introduction qui risque de laisser sur le carreau le lecteur gourmand d'aventure et de panache. Le narrateur (qui n'est pas omniscient, mais ne fait usage de la première personne que très rarement, à tel point qu'on se demande l'intérêt d'un tel parti-pris) s'excuse occasionnellement de ce récit qui ne démarre pas ; ainsi, à la page 238 (sur 390 !), alors que les personnages regagnent la Californie, on peut lire (traduction maison) : « En fait, c'est là que la véritable aventure de Zorro commence, la saga qui a fait sa réputation à travers le monde. Alors, je vous en prie, ayez encore un peu patience. » Pour un peu, on aurait l'impression d'être victimes de la blague des balles de ping-pong roses.

Si encore l'approche parodique était délibérée, on pourrait s'amuser de voir Diego décrit comme un adolescent mal fini, aux oreilles décollées et soupirant auprès de sa belle sans espoir de la conquérir. Mais ces aspects, bien que traités sur un ton affectueusement moqueur, restent assez secondaires dans un roman qui privilégie le sérieux et la rigueur du récit initiatique de base. Diego empile donc les rencontres, amicales ou antagonistes mais jamais bien marquantes, jusqu'au jour où il "devient" enfin Zorro, dans les toutes dernières pages. Une telle chronique aurait probablement son intérêt s'il s'agissait d'un personnage historique, mais dans la mesure où il s'agit d'une figure fictive, on peine à comprendre ce qui pousse un auteur à raconter la partie de sa vie au cours de laquelle il ne se passe rien...

En 2008, Zorro Productions fut associé à un autre livre, intitulé Tales of Zorro et réunissant dix-sept de nouvelles signées Peter David, Max Allan Collins ou encore Richard Dean Starr. Gageons que celles-ci ont la bonne idée de traiter leur sujet. Isabel Allende en écrivit la postface.