Marija Nielsen - Interview

/ Interview - écrit par Lestat, le 10/04/2004

Tags :

Interview de Marija Nielsen en 2004

Jeune talent qui n'en manque pas, Marija Nielsen a accepté de répondre aux questions de Krinein. L'occasion de découvrir celle qui un jour décida de se consacrer à sa passion : l'écriture. Rencontre avec une écrivain à l'univers séduisant...

Marija Nielsen
Marija Nielsen
Peux-tu nous parler un peu de toi, de ton parcours, de ce qui t'a poussé vers l'écriture ?

Alors, moi, je suis Danoise et je vis en France depuis 1989. J'ai commencé par faire des études de graphismes un peu chaotiques que j'ai ensuite abandonnées pour apprendre "sur le tas". Mon premier rêve d'enfance était de travailler dans le milieu artistique et ensuite, devenir écrivain plus tard. En 1999, suite au décès de mon premier enfant, j'ai écrit un livre encore non publié, qui a ouvert les vannes, en quelque sorte. J'ai suivi des cours par correspondance en Angleterre et en France, ce qui m'a permis de découvrir toutes sortes de techniques pour construire une histoire et développer personnages et dialogues. Mes profs étaient unanimes dans leurs critiques positives, ce qui m'a donné la confiance et le courage d'envoyer mes textes aux magazines et aux fanzines. J'ai été publiée en France, au Danemark, en Angleterre et le serai bientôt aux Etats-Unis.


Qu'est ce qui t'attire dans le genre fantastique et horrifique ?

Difficile de répondre - parfois, on aime sans savoir pourquoi. Je suis une personne douce, sensible et pas méchante pour un sous, pourtant, je me délecte comme une petite folle devant des choses aussi glauques et crasseuses que Massacre à la Tronçonneuse, Henry, Portrait d'un Serial Killer, la trilogie des Morts-Vivants, les films de Fulci, etc. Je pense que c'est aussi une sorte d'échappatoire, une sorte de soupape de sécurité pour éviter de céder à ses pulsions les plus enfouies. Je n'ai envie de massacrer personne, je vous rassure, mais tout ce que j'écris vient bien de quelque part..


Est ce qu'il y a un livre ou un film, voir un autre type d'oeuvre qui t'aurais donné le goût du genre ?

A l'âge de 13 ans, mon frère et moi sommes allés chez un copain à lui qui avait des films qu'il fallait absolument qu'on voie. Alors, c'était un double programme K7 d'Evil Dead et de Zombie. Avouez qu'il y a pire comme entrée en la matière... Voilà. Ceci explique cela.


Je te trouve certains traits de plume avec Stephen King, c'est une de tes références ?

Merci du compliment. Je possède l'oeuvre complète de Stephen King, mais je ne suis pas une inconditionnelle dans le sens où dès que c'est du King, c'est forcément merveilleux ! Il reste cependant imbattable sur sa façon de développer ses décors et ses personnages. Et j'adore sa façon d'employer les mots, ses constructions de phrases, etc. Mais c'était plus visible dans ses premiers livres.


Est-ce qu'il y a d'autres auteurs que tu apprécies et qui t'ont influencé d'une manière ou d'une autre ?

Etant donné que je suis une boulimique de livres, je possède les oeuvres complètes des auteurs que j'aime le plus. Alors forcément, une lecture aussi exhaustive laisse des traces, c'est évident. Mais j'essaie de ne copier personne, je laisse les mots couler de mon âme sans censurer quoi que ce soit, parfois même sans savoir à l'avance ce que je vais écrire. Ce doit venir d'une sorte de mémoire héréditaire (rigolez pas, j'y crois !).
Dans le genre fantastique, j'apprécie particulièrement Ramsey Campbell, H.P. Lovecraft, Graham Masterton, Richard Matheson, et j'en oublie, bien sûr. Et comme je lis à peu près tout ce qui est imprimé et que je pense qu'il faut avoir un éventail large pour apprendre, j'aime d'autres auteurs aussi : W.S. Maugham, James Ellroy, Henning Mankell, Amélie Nothomb, John Irving...


Tu semble beaucoup puiser dans le cinéma également. "J'attends" par exemple, est une très belle réflexion sur le mythe du zombie, tout en noirceur et en pessimisme, où l'on retrouve un peu de l'univers de Romero...

Encore une fois, merci et bien vu ! Je suis effectivement plus inspirée par le cinéma qu'autre chose. Quand je suis à court d'idées, il m'arrive d'en puiser dans une encyclopédie de films d'horreur, mais seulement avec des films que je n'ai pas vus, pour ne pas être influencée par le souvenir.
"J'Attends" s'inspire de deux choses : l'image de la petite fille zombie dans Night of the Living Dead de Romero et des écrasants sentiments de culpabilité, de désespoir, d'impuissance et de vide m'ayant envahis suite au décès de mon premier enfant.
J'aimerais bien écrire sur le mythe du vampire, mais c'est vraiment difficile de trouver un angle original, tant tout a déjà été fait et refait.


Tu as envie de prendre la caméra ou d'écrire des scénarios un jour ?

Décidément, tu sais lire entre les lignes ! J'adorerais écrire des scénarios. J'en possède pleins, ainsi que quelques livres de technique, mais cela me semble 1000 fois plus dur à vendre qu'une nouvelle à un magazine. Par contre, je ne me sens pas l'âme d'une directrice, bien que j'aimerais pouvoir participer un minimum à la mise en images d'un de mes scénarios. Mais je ne rêve pas trop, et j'entends d'ici tous les scénaristes de la Terre rigoler !


Tu avoues être passionnée par le comportement humain. Effectivement, les histoires que j'ai lues comportent souvent un petit côté imprévisible ou cruel et qui crée ton univers bien à toi. "Le Sous sol" plutot mignonne qui s'intéresse aux peurs de l'enfant, jusqu'à "Au fond de l'Abysse" qui est une nouvelle assez dérangeante où rien ne distingue le réel du fantasmé. Qu'est ce qui te fascine tant dans ce qu'on pourrait appeler le côté obscur de l'humain ?

"Le Sous-Sol" était au départ une histoire bien plus noire. En fait, l'enfant se faisait tuer par le monstre de ses cauchemars. Et puis, ça m'a déprimé de faire mourir encore un enfant, alors l'histoire s'est transformé en quelque chose de bien plus léger et de mignon, comme tu dis. Mais la cave existe vraiment, telle que je l'ai décrite, croyez-le ou non ! Elle se trouve sous une maison où nous vivions en Belgique quand j'étais petite. J'ai dû y descendre 2 ou 3 fois en 5 ans. Le reste du temps, je m'efforçais d'ignorer son existence. Mais je me souviens si bien de cette cave et des sentiments qu'elle m'inspirait que mon histoire continue de me faire frissonner et sourire.
"Le Fond de l'Abysse" a été assez dure à écrire, et la frénésie finale de l'Agent James me met encore extrêmement mal à l'aise. C'est une sorte de réflexion sur les "traqueurs" de tueurs en série, une de mes passions, ce qui m'amène à répondre à ta question (enfin !) : au départ, il y a eu un fait divers banal comme il y en a malheureusement trop, la violence conjugale. A défaut de pouvoir y changer quelque chose, j'ai voulu comprendre. A force de me documenter sur les comportements violents, j'en suis naturellement arrivée aux comportements criminels. Puis, en 1993, j'ai découvert "Serial Killers, Enquête..." de Stéphane Bourgoin, et j'avais trouvé mon sujet de prédilection. Ou plutôt, il m'avait trouvé. Le côté sombre de l'être humain est bien plus intéressant à explorer et pour moi, les tueurs en série représentent ce qu'il y a de plus extrême. Voilà pourquoi j'aime mettre un personnage des plus banals face à une situation totalement inattendue et contraire à tout ce qu'il croyait être la réalité. Que va-t-il se passer ?


Comment est né "Zeke et le Nain de Jardin" ? C'est une histoire peu banale et finalement assez troublante...

Tu risques d'être déçu : une maison de jeu pour enfant et un vendeur de fenêtre un peu trop zélé ! Autant j'aimerais dire que j'ai trouvé l'idée toute seule, j'suis bien obligée de créditer mon mari. Un jour, il m'a dit : T'imagines si un nain de jardin emménageait dans la maison de jeu d'Irina (notre 2è enfant) ?. J'ai répondu oui, bien sûr, et puis l'histoire a un peu dégénéré... Mais j'suis contente d'avoir pu lui régler son compte, au vendeur... (rires)


Il y a une série Z qui s'appelle La Nuit de l'Invasion des Nains de Jardins de l'Espace, un court métrage. Tu t'en es inspirée pour certains passages ?

Je jure sur le Grand Dieu des Nains de Jardin de l'Espace et d'Ailleurs que je n'en ai jamais entendu parler ! Mais t'as piqué ma curiosité : ce court-métrage, est-il visible quelque part ?


Il a été édité en VHS il y a 6-7 ans si ma mémoire est bonne, mais on peut hélas le considérer comme quasiment introuvable. Essaies peut être en Cash Converter, en magasins d'occasions...Et n'oublions pas Arte ou Canal qui diffusent souvent des courts métrages. Un jour peut être...

(enchaînons ^^ )

Ton film et ton livre culte ?

Il y en a plusieurs. Pour les livres :
- Of Human Bondage, de W.S. Maugham
- Les Oeuvres Complètes de Lovecraft
- Les Histoires Complètes de Sherlock Holmes, de Sir A.C. Doyle
- Ca, de Stephen King
Pour les films :
- Evil Dead, de Sam Raimi
- Orange Mécanique, de Stanley Kubrick
- The Killer, de John Woo
- Fight Club, de David Fincher
Ce sont des oeuvres qui m'ont marquée à des moments différents de ma vie et qui gardent ce côté "sentimental".


Un coup de coeur récemment, dans ces deux domaines ?

Côté livres, un auteur : Maxime Chattam.
Côté films, je mettrais bien Haute Tension mais moins le début et les 12 minutes de la fin, ça compte ? Sinon, Nuits de Terreur et Jeepers Creepers.

Quels sont tes projets dans l'immédiat ? tu as des romans sous le coude je crois ?

Mon roman est écrit du début à la fin, mais n'est pas encore prêt à être soumis aux éditeurs. Désolée, mais il ne comporte pas un gramme de fantastique... Sinon, je continue bien sûr d'écrire des nouvelles horribles et décalées, ce qui m'amuse le plus. Le problème, c'est que j'ai trop d'idées et pas assez de temps.


Je te laisse le mot de la fin... la colonne t'est ouverte

J'ai juste envie de remercier quelques personnes qui m'ont encouragé et cru en moi : Muriel C. qui sait pourquoi, Maggy - une amie et lectrice sincère, mes copains écrivains sur la Rue (Emm, Mim, Bec, JP, Céc, Nhe, Cas, Zsc, Sel et ceux que j'oublie) (pour arpenter la rue, c'est par ICI, NdL), ma p'tite famille et, bien sûr, tous ceux qui m'envoient des gentils messages qui me vont droit au coeur ! Ben oui, j'suis un peu sentimentale, mais on a toujours besoin de bases solides et de soutien. Alors, la reconnaissance reste toujours de mise.
Bon, qu'est-ce que vous faites encore là ? Allez lire mes histoires, maintenant ! ;-)

Un grand merci à Marija Nielsen que l'on espère trouver bientôt en rayons. En attendant, comme elle le dit si bien, filez lire ses histoires :)
Vous en trouverez quelques une sur SON SITE...