5.5/10L'Erreur est humaine

/ Critique - écrit par riffhifi, le 17/08/2008
Notre verdict : 5.5/10 - Vous savez ce qu'il Woody ? (Fiche technique)

Qu'on aime ou non le cinéaste, Woody Allen possède un nom connu, synonyme de rigolade pour le grand public qui aperçoit son bouquin en tête de gondole. Pourtant, il n'y pas de quoi se gondoler excessivement devant ce recueil de nouvelles poussives.

Dix-huit nouvelles humoristiques dans un recueil intitulé Mere anarchy en anglais et L'erreur est humaine en français. On aurait pu aussi bien l'appeler Poireau-vinaigrette, Attention à la ratiboise, Robin des Bois fait du patinage artistique ou L'incroyable galerie d'altruisme modéré du professeur Tartopiment. Aucun lien ne relie les 18 historiettes réunies ici, en dehors du nom prestigieux de leur auteur : Woody Allen. On connaît le loustic, depuis quatre décennies qu'il écrit et réalise un film par an pour le plus grand bonheur des amateurs de psychanalyse (la pratique, pas la théorie), d'humour angoissé et d'auto-réflexion sur le monde du spectacle et de la création. On le connaît aussi en tant qu'interprète de la plupart de ses films, voire de ceux des autres, petit bonhomme caché derrière des lunettes en cul de bouteille et invariablement emmitouflé dans la mauvaise foi de ses paroles et le tourbillon de ses vannes continuelles. Certains le connaissent même comme joueur de clarinette amateur (voir le documentaire de 1997 Wild man blues)... Mais en tant qu'auteur, on ne lui doit que quelques recueils de blagounettes, pensées en vrac et textes humoristiques (Pour en finir une bonne fois pour toutes avec la culture, Destins tordus). On préfèrerait lire de lui un bon gros roman scrupuleusement construit, plutôt qu'une somme de nouvelles ultra-courtes (moins de 10 pages en moyenne !) qui semblent être les fins de carnets qu'il n'a jamais pu caser dans ses films faute de place. Mais finalement, lorsqu'il construit une histoire, il en tire un scénario complet, va-t-on l'en blâmer ?

Ici, Woody s'inspire de quelques faits lus dans le New York Times ou entendus à la télé, se remémore un souvenir d'enfance ou décide de rendre un hommage à un auteur qu'il aime, et hop, pond sur le sujet une dizaine de pages huilées à l'humour allénien. Un humour qu'il devient si facile d'identifier que l'on pourrait presque le croire répliqué à l'envi par une escouade de nègres que l'auteur paierait en virées au Delicatessen le plus proche (la pause Delicatessen est un des rares éléments à se retrouver dans quasiment toutes les nouvelles, à se demander si elles n'ont justement pas été écrites sur la nappe par un Woody Allen impatient de voir arriver sa commande sur la table). Un humour qui repose généralement sur l'opposition entre le divin et le trivial, entre le métaphysique et le quotidien (« Je me suis réveillé vendredi, mais comme l'univers est en pleine expansion, il m'a fallu plus de temps que de coutume pour trouver ma robe de chambre »), parfois utilisé jusqu'à l'écœurement - surtout quand il ne l'est pas pour servir un quelconque propos. On s'en doute, la plupart des nouvelles restent agréables à lire, bien que certaines se rendent presque antipathiques à force de virer au trip autiste (Théorie des cordes et désaccord) ou de faire usage de termes si savants qu'Umberto Eco lui-même hésiterait à les caser dans ses écrits les plus pédants (Le chantier infernal, ses ectomorphes et sa « vision coleridgienne des transformogrifications décisives »). Le bouquin s'emporte facilement sur la plage, et peut s'y oublier sans complexe au profit du prochain vacancier qui se fera une joie de le découvrir dans le sable. Chaque histoire, par sa brièveté, nécessite une durée d'attention réduite au minimum et peut aisément s'oublier au profit de la suivante. N'empêche que si vous avez un écran sous la main, vous gagnerez à piocher dans la filmographie de Woody Allen plutôt que d'avaler ces apéricubes peu nourrissants.

Mais bon, l'erreur est humaine.