7/10L'Empire des anges

/ Critique - écrit par Filipe, le 26/05/2002
Notre verdict : 7/10 - "L'humour, le paradoxe, le changement" (Fiche technique)

Bernard Werber est un petit peu plus qu'un simple écrivain, c'est un penseur des temps modernes dont les propos pleins de bon sens en appellent à nos capacités d'imagination et à une autre faculté, certes, plus ou moins développée selon les individus : notre curiosité intellectuelle.

Né en septembre 1961 à Toulouse, il commence à écrire dès sa plus jeune enfance. Sa première nouvelle s'intitule Les aventures d'une puce. Il voit ses études à l'Ecole Supérieure de Journalisme couronnées par le prix de la fondation News du meilleur jeune reporter, ce qui lui offre l'opportunité de découvrir la Côte d'Ivoire et ses fourmis Magnans. Il est tour à tour journaliste à Cambrai, puis pigiste à l'Evénement du jeudi, au Point, à Libération et à ça m'intéresse. De 1983 à 1990, il travaille pour le Nouvel Observateur.

Sa bibliographie s'étend toujours davantage au fil des années : rappelons en vrac Les Fourmis (1991), Le Jour des Fourmis (1992), Le Livre secret des Fourmis : Encyclopédie du Savoir Relatif et Absolu (1993) et Les Thanatonautes (1994). Et L'Empire des Anges (2000).

"L'amour pour épée, l'humour pour bouclier".

Que pensent les anges de nous ? Quelle est leur vision de notre espèce grouillant sur la terre ?

"Donc je meurs. C'est arrivé vite et fort. A l'improviste. Il y a eu un grand bruit. Je me suis retourné. J'ai vu l'avant d'un Boeing 747 (probablement égaré suite à une grève des aiguilleurs du ciel) qui surgissait dans ma baie vitrée, fracassait les murs, traversait mon salon, anéantissait mes meubles, pulvérisait mes bibelots, s'avançait vers moi dans sa course folle."

Telles sont les quelques dernières pensées de Michael Pinson, ancien thanatonaute (du grec "thanatos" -divinité de la mort- et "nautès" -navigateur-), qui se retrouve désormais de l'autre côté du mur. Et aujourd'hui commence sa carrière d'ange au service des hommes. Au service de trois de ces mortels plus précisément. Michael assiste à leur naissance. Leurs noms : Vénus, qui naît dans les bras de son jumeau mort-né ; Igor, dont la mère n'a cessé de le rouer de coups jusqu'à ce qu'il en soit délivré par un boulanger ; Jacques enfin voit le jour, ce qui fait le bonheur de toutes ses soeurs qui voient en lui un nouveau nounours.

"Le but de tout est d'évoluer".

A l'inverse de ses fourmis, il nous est donné avec L'Empire des Anges d'observer d'en haut le comportement des êtres humains, leurs façons de voir les choses et de s'adapter aux situations. Le thème est donc finalement le même : c'est l'homme qui intéresse Werber, et ce bien qu'il nous plonge au coeur d'un univers fantastique, un monde peuplé d'êtres fabuleux inobservables pour le commun des mortels.

"Le temps n'est peut-être pas linéaire mais lasagnique".

Nous sommes tantôt sur les traces de Vénus, la belle Américaine qui rêve de faire les couvertures des magazines les plus populaires et sur celles d'Igor, qui après avoir connu les joies de l'orphelinat, de la prison et de l'hôpital psychiatrique, semble ne pas avoir sa place sur cette planète. Tantôt sur les traces de Jacques, dont les WC sont pour lui un refuge et les livres, un moyen de fuir, et tantôt dans l'envers du décor, là où les anges et les archanges jouent au scrabble tout en nous observant, là où ils jugent les morts et inculquent leurs âmes aux nouvelles enveloppes charnelles.

"Croire ou ne pas croire, cela n'a aucune importance. Ce qui est intéressant, c'est de se poser de plus en plus de questions."

Voilà donc pour L'Empire des Anges. Une oeuvre de sociologie ponctuée de remarques fines et intéressantes, de citations qui en disent long, et de clins d'oeil à d'autres oeuvres aussi bien littéraires que musicales ou encore cinématographiques. Bernard Werber ne déçoit pas. Il reste fidèle à son style d'écriture atypique et pas toujours raffiné, fidèle à ses pensées et à sa façon d'interpréter les choses de la vie. L'Empire des Anges est une oeuvre accessible à tous à lire absolument.

N'oubliez pas non plus les autres recueils werberiens. Tous apportent un peu plus au vaste édifice de la littérature française dite de qualité. Tous sont véritablement captivants.