5.5/10Dix-neuf secondes

/ Critique - écrit par Kassad, le 29/08/2005
Notre verdict : 5.5/10 - dix-neuf fois sur le métier remettez votre ouvrage... (Fiche technique)

Tags : pierre charras secondes citation litterature livres sandrine

Un exercice de style en littérature c'est se mettre consciemment des batons dans les roues, se contraindre à suivre des directives qu'on se donne soi même. La disparition de Pérec, tout un roman en français sans utiliser la lettre "e", en constitue sûrement l'exemple extrême. Pierre Charras se lance lui aussi dans l'aventure, tout est dans le titre : Dix-neuf secondes.

Dix-neufs secondes, c'est le temps que met une rame de RER pour entrer et resortir d'une station. C'est aussi le temps que peut mettre une vie pour se détruire. Gabriel et Sandrine sont au bout de leur amour, après une dernière dispute, ils conviennent d'un scénario. Gabriel demande à Sandrine, si elle veut continuer à vivre avec lui, de prendre le RER "ZEUS" et de descendre à la troisième porte de la troisième rame à Nation. Si elle ne vient pas cela signifiera que tout est fini entre eux.

Le ton de cette petite nouvelle est, on s'en doute, plutôt nostalgique. Au fur et à mesure des secondes qui s'écoulent c'est toute la vie de Gabriel et Sandrine qui est passée en revue. Les couacs d'une vie de couple qui sombre lentement de la passion à l'indifférence. Là, Pierre Charras montre un véritable talent pour saisir ces petits riens qui forment la trame de la vie de tous les jours. Les tranches de vie des autres protagonistes (les autres voyageurs de la rame) sont aussi réussies : l'auteur arrive à donner du relief à une situation banale en croisant les regards. On passe du point de vue d'un intellectuel homosexuel à celui d'une jeune fille qui se rend à un rendez vous amoureux. Comment chacun voit l'autre et inversement est une technique qui a fait ses preuves et qui est ici bien utilisée.

Cependant, si la première partie de Dix-neuf secondes est une vraie réussite, on ne peut en dire autant de la suite malheureusement. L'exercice de style y tourne à l'eau de boudin et au grand-guignol. Rarement j'ai vu une telle différence de niveau à l'intérieur d'une même oeuvre. La partie deux est déja de trop, quant à la partie trois c'est à un "lachage" en règle auquel on assiste. Je vous conseille de ne même pas les lire pour garder intact le plaisir du début.