7/10Les Contes du chat perché

/ Critique - écrit par Luz, le 22/07/2008
Notre verdict : 7/10 - Chat ! (Fiche technique)

Bien avant le Chat potté à épée de Shrek, Marcel Aymé séduisait petits et grands enfants avec ses Contes du chat perché, où la simplicité, l'humour, et le rêve règnent.

Les contes du chat perché... Un nom que vous avez, pour la grande majorité, déjà entendu. Pourquoi ? Pour la simple et bonne raison qu'il s'agit d'un livre souvent étudié au collège. Parfois, ça dévalorise une œuvre aux yeux du pauvre collégien, non amateur de littérature, forcé de se « coltiner un bouquin » de plus de 10 pages, d'en faire une fiche, et en plus de passer par la case interrogation surprise du lundi matin.

Vous vous en doutiez, il s'agit d'un ensemble de contes. Si vous ne possédez pas l'intégrale, il s'agit en fait non pas d'un, mais de deux recueils : les contes rouges, et les contes bleus. Après un long retour dans une mémoire bien trop floue, et une recherche peu réussie, il faut avouer que la raison des couleurs, le choix de la division des contes ne semblent pas avoir de réels critères. On pourrait dire qu'il y a, tout simplement, deux grands tomes, parfois séparés en petits livres à histoire unique, ou regroupés en intégrale, souvent réédités, et illustrés principalement par Natalie Parain (1937), Eléonore Schmid (1978), Philippe Dumas (1979), et Claudine Sabatier (1995).

Au travers de petites histoires courtes, nous suivons deux fillettes malines, Marinette et Delphine, et leurs sévères et antipathiques parents. Fort heureusement pour les deux jeunes héroïnes, elles sont entourées de tous leurs aminaux (appelés plus communément animaux) qui n'hésitent pas à ruser pour les sortir des situations les plus hasardeuses. Tout a l'air si simple, si banal, et pourtant on en est loin. Bien sûr que de voir des animaux dans une ferme ça semble ordinaire, mais des animaux qui s'expriment dans la langue de Molière, qui ont un esprit vivace, malin, qui sont aptes à se défendre, à attaquer, à rétorquer, et qui possèdent chacun une forte personnalité, c'est tout de suite plus surprenant. D'autant plus qu'ils échangent, communiquent avec les parents, les fillettes, naturellement. Ce qui est invraisemblable passe alors dans une nouvelle réalité.
D'ailleurs, n'est pas personnage principal qui l'on croit l'être. Car même si Marinette et Delphine semblent avoir ce joli rôle, ça n'est pas forcément vrai. Elles sont le lien qui unit les histoires entre elles, parfois même l'élément déclencheur, mais elles laissent leurs places dans les titres, que ce soit celui du recueil en lui-même ou celui de chaque histoire, aux animaux : Les vaches, Le chien, Les bœufs, Le mouton,... et bien sûr le chat.

Comme l'exprime explicitement Marcel Aymé lors de sa préface, ses écrits sont destinés à un public bien défini et pourtant extrêmement varié : les enfants, oui, mais de 6 à 77 ans. On ressent vite une double portée dans chaque conte, l'une visant l'enfant, bien entendu, maladroit, en lui disant par exemple « si tu ne fais pas attention, tu vas casser un vase en jouant », et l'autre visant les parents, et leur injustice cruelle par moment. Chacun pourra choisir ce qu'il préfère y lire, tout en appréciant forcément l'échelle de gravité que nous fournit l'auteur. Educatif ? Oui, on peut le dire.
Mais un livre c'est aussi, et surtout, du plaisir. Tourner les pages, c'est accéder inconsciemment à ce petit monde étrange, passer du temps avec cette famille de paysans, s'assoir aux côtés de Delphine et Marinette, et regarder par la fenêtre ces animaux étrangement bavards. Dans ce monde imaginaire côtoyant de très près la réalité, les yeux de petits et de grands enfants sont rois, et inévitables. Et il faut dire que cette visite est fort agréable, tellement les mots sont simples ; on a parfois peur, mais on est vite rassuré, grâce aux pattes de velours du chat, ou aux paroles sereines du vieux cheval.

Ainsi, passé le stade d'obligation scolaire, reconnaissons-le, ce petit livre est très intéressant, et a toute sa place dans un programme scolaire, tout comme sur une table de nuit, ou une bibliothèque. Il fait partie des livres qui nous verront grandir, vieillir, sous leur amas de poussière, pour un jour se voir souffler dessus et rouvrir.