6.5/10On a volé Napoléon

/ Critique - écrit par Lestat, le 02/02/2005
Notre verdict : 6.5/10 - Dommage (Fiche technique)

Tags : napoleon paris france musee saint vol oeuvres

Eugène Bonplaisir, Sapeur sans reproches et mutilé de guerre napoléonienne s'en revient en France, le coeur en berne. Son Empereur est exilé et lui même, tel Rambo, est persécuté par ses semblables. Peu à peu, il ne vit plus que pour une seule chose : faire évader Napoléon et le remettre à la tête de la France. Avec l'aide de son vieil ami Balthazar Amora et de la belle (de nuit) Arabelle, il va mettre au point un plan aussi biscornu que machiavélique...

De par son sujet peu commun, On a Volé Napoléon aurait put être une uchronie tout à fait sérieuse. Pourtant, il s'agit ici d'une sorte de variation des faits, traitée sur le mode de l'humour, tout en étant assez documentée pour entrer dans la catégorie du roman historique. Au fil de cette histoire folle, nous trouvons en effet des petits aperçus d'époque, des références et finalement un intéressant travail de banalisation de cette période trouble qui suivie l'exil de Napoléon et la passassion des pouvoirs aux Bourbons. A côté de cela se greffe cette intrigue assez saugrenue pour embarquer le lecteur, qui pourra se complaire dans un florilège de calembours plus ou moins foireux et de situations surréalistes. Le mélange des styles s'effectue parfaitement et le livre ne souffre d'aucuns temps morts. Mais aussi réussi soit-il il y a pourtant un bémol de taille dans On a Volé Napoléon.

Ce bémol est également la force de ce livre. Richard Jones, l'auteur, sait écrire, c'est indéniable. Il faut le voir, ou plutôt le lire, partir dans des descriptions échevelées de scènes de sexe, avec force métaphores rendant le tout salé sans tombé dans la vulgarité ou la simplicité, ou encore brosser d'irrésistibles portraits pour s'en rendre compte. Hélas, il alterne ces moments de bravoure avec ce qui restera dans ce livre comme une constante courante de son écriture : des phrases rageuses, courtes, comme balancées à brûle-pourpoint, sans sujets, imparfaites : "Rébellion ! Le Mercenaire voulait bien suivre ses compagnons de beuverie moyennant finance mais voulait pas se déguiser en femme...avait son honneur, sa pudeur, sa fierté. Etait descendu dans le ruisseau mais n'irai pas jusqu'au trottoir ! "(p. 217). Le procédé, curieux en soi, donne un résultat franchement désagréable qui nuit beaucoup au plaisir total qu'on aurait eu à lire On a Volé Napoléon. Richard Jones a un talent évident, pourquoi donc partir dans de tels effets de style qui ne font que saboter inutilement son trait de plume ? Comme un malheur n'arrive jamais seul, ce défaut fait ressortir des faiblesses dans le registre comique, faiblesses dont il serait fait abstraction en temps normal. Il y a à ce niveau des facilités malvenues, des grossièretés dont on se serait passé. C'est dommage car le livre est, à part ces points fâcheux, tout à fait plaisant.

Un mélange de genre réussi, une histoire bien enlevée mais un style parfois peu adapté. Ironie du sort, Richard Jones aura finalement déjoué tout les pièges sauf les siens. Reste un concept sympathique pour un livre léger et enjoué qui vous permettra sûrement des instants agréables. Encourageant, mais rageant...